Revue
internationale de la Croix-Rougeno 828, p.780-788
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Livres et revues : "Outline of International
Humanitarian Law" par Sienho
Yee
Sienho
Yee, docteur
en droit de la faculté de droit de l'Université de Columbia (New York), a été
assistant du juge Haopei Li (Chambre d'appel du Tribunal pénal international
pour l'ex-Yougoslavie).
Zhu Wen-Qi,
Outline of International Humanitarian
Law, Hong Kong/Shanghai, Peter Chan
Publishers/International Committee of the Red Cross, 1997, 182 pages - en
chinois, accompagné d'un résumé en anglais.
La culture chinoise accorde
traditionnellement une place importante aux considérations humanitaires.
À l'instar des enseignements
propres à d'autres cultures, les enseignements de Confucius sont mis en évidence
au Musée international de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge, à Genève. Les
instructions données par Mao Zedong sont citées dans l'opinion majoritaire de la
chambre d'appel du Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie concernant
l'affaire Tadic, en tant que preuve de la pratique des États s'agissant de l'extension aux conflits
armés internes de certains principes généraux du droit de la guerre [1]. Pourtant, pour une raison qui nous
échappe, il existe peu d'ouvrages théoriques en langue chinoise dans lesquels le
droit international humanitaire fait l'objet d'un examen systématique.
Assurément, l'ouvrage de Zhu Wen-Qi, publié à l'invitation du CICR sous le titre
anglais de « Outline of International Humanitarian
Law » (aperçu du droit international humanitaire),
contribuera à combler cette lacune.
Première
monographie sur le sujet jamais parue en Chine, cette publication vise à
faciliter la diffusion des règles et des principes essentiels du droit
international humanitaire, tant en Chine même que dans le monde sinophone. M.
Zhu est tout à fait qualifié pour cette tâche. Il a obtenu son doctorat en droit
international à l'Université de Paris II et a effectué un stage au sein de la
Division juridique du CICR. Il a ensuite rejoint le Département des traités et
du droit au ministère chinois des Affaires étrangères et a été nommé directeur
adjoint de division. Il est actuellement conseiller juridique au Bureau du
procureur du Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie à La Haye. Il
est l'auteur du chapitre sur le droit de la guerre dans le manuel de droit
international habituellement utilisé dans les universités chinoises, ouvrage
publié sous la direction du professeur Wang Tieya. Ce chapitre contient une
partie consacrée au droit international humanitaire, et c'est la première fois
que ce sujet est traité séparément dans un manuel du droit international destiné
aux universitaires chinois.
Comparé à d'autres
ouvrages du même genre, celui de M. Zhu est dense. Il comporte une introduction
et cinq chapitres intitulés respectivement :
- TheHistorical Development of Humanitarian Law ; China
and Humanitarian Law (le développement historique du
droit humanitaire ; la Chine et le droit humanitaire)
- TheRules and Principles of International Humanitarian
Law (les règles et principes essentiels du droit
international humanitaire)
- The Main Legal Questions of International Humanitarian
Law (les principales questions juridiques dans le
domaine du droit international humanitaire)
- Distinguishing Features of International
Humanitarian Law in International Law (spécificités
du droit international humanitaire dans le droit
international)
-
International Humanitarian Law and International Human Rights
Law (droit international humanitaire et droit
international des droits de l'homme)
En outre,
l'ouvrage est préfacé par le juge Shi Jiuyong, de la Cour internationale de
Justice et comporte deux annexes : General
Introduction to the Red Cross Society of China [2] (introduction générale à la Croix-Rouge
chinoise) et The International Red Cross and Red
Crescent Movement : Its Origins, Structure, and Mandate [3] (le Mouvement international de la Croix-Rouge et du
Croissant-Rouge : ses origines, sa structure et son mandat) - qui sont
accompagnées des textes juridiques pertinents.
Conçu comme une introduction aux principes essentiels du droit
international humanitaire et aux questions apparentées, le propos de M. Zhu
n'est pas de les traduire tout simplement en chinois. Dans la présentation de
ces principes essentiels et de la philosophie qui les sous-tend, M. Zhu accorde
une attention particulière à l'histoire de la Chine et à la situation qui
prévaut actuellement dans ce pays. Il aborde ainsi différents thèmes revêtant
une importance particulière pour la Chine comme la question du droit, pour le
CICR, de visiter les personnes détenues pour des motifs politiques ou de
sécurité, ainsi que les différences entre le droit international humanitaire et
le droit international des droits de l'homme. C'est là une entreprise louable
qui contribuera à dissiper certains des malentendus qui pèsent sur les concepts
de base du droit international humanitaire.
Dans
son introduction, M. Zhu décrit brièvement différents concepts ayant un rapport
avec le droit international humanitaire, tels que le droit international
général, le droit de la guerre, le droit de La Haye et le droit de Genève,
le jus cogens, le droit
international coutumier, et, enfin, les notions de guerre et de conflit armé. Il
évoque également la place du droit international humanitaire dans le droit
international en général, ainsi que sa portée actuelle. Il expose ensuite les
problèmes fondamentaux abordés dans son ouvrage. L'auteur affirme que la
traduction courante actuelle en chinois de l'expression « droit international
humanitaire » - « Guoji Rendao Zhuyi Fa
» - est incorrecte. S'il n'a aucune objection en ce
qui concerne « Guoji »(international),« Rendao »(humanitaire)et«
Fa » (droit), l'auteur
s'interroge à propos du mot« Zhuyi ». En
effet, en chinois usuel, le terme « Zhuyi
» s'applique à une doctrine, ou à une théorie,
d'ordre politique, philosophique ou social - marxisme, léninisme, socialisme ou
communisme, par exemple. Par conséquent, le mot « Zhuyi » peut difficilement être accolé au
terme « Fa », qui
signifie le droit ayant force obligatoire. M. Zhu préconise par conséquent de
supprimer le terme « Zhuyi » dans la traduction en chinois courant et de ne garder que «
Guoji Rendao Fa », qui
correspond mieux à l'anglais « international
humanitarian law » et au français « droit
international humanitaire ». Si la tournure prônée par M. Zhu est généralement
acceptée, cela contribuera à clarifier le concept auprès du grand public
sinophone, sachant que pour les personnes réellement au courant des questions
humanitaires, de telles difficultés d'ordre phraséologique ne sont pas d'une
très grande importance.
Dans le premier chapitre,
M. Zhu évoque les origines et le développement du droit international
humanitaire et il indique comment se présentent aujourd'hui en Chine les
questions humanitaires et le droit international humanitaire. Pour ce faire,
l'auteur non seulement relate l'histoire bien connue de Henry Dunant, la
création du CICR et les efforts inlassables de l'institution, mais il souligne
aussi l'universalité des préceptes humanitaires. Toutes les nations partagent le
souci de préserver la dignité humaine. Aucune culture ne saurait prétendre en
avoir le monopole [4]. La première partie de ce chapitre résume le développement
du droit de Genève et du droit de La Haye. Le contexte historique étant connu,
il est évoqué de manière succincte.
La deuxième
partie du premier chapitre décrit brièvement les théories de la Chine antique
relatives aux considérations humanitaires en temps de guerre. Les lois de la
guerre sont aussi anciennes que la guerre elle-même. On retrouve les racines du
droit humanitaire dans les enseignements des penseurs, souverains ou stratèges
militaires chinois dont l'influence fut grande tout au long de l'histoire de la
Chine. Par exemple, M. Zhu cite les préceptes de Sun Zi, dont le célèbre
ouvrage L'Art de la guerre, qui date d'environ 500 av. J.-C. mais qui, aujourd'hui encore,
continue d'être très largement lu à travers le monde. Ne voyant pas l'intérêt
d'élaborer des stratégies devant permettre de remporter une victoire à court
terme, Sun Zi préconise de chercher à vaincre l'ennemi par la moralité et
affirme qu'un habile stratège devrait être capable de vaincre une armée ennemie
sans lui livrer combat, de prendre une ville ennemie sans en faire le siège et
de renverser un État ennemi sans souiller les épées de sang. En d'autres termes,
les maux superflus devraient être évités. Sun Zi estimait également qu'un
général doit à la fois apprendre à ses troupes à raisonner et faire régner une
discipline de fer dans les rangs de son armée. L'une des règles importantes
stipule qu'un soldat ne doit pas attaquer des civils ou endommager leurs biens.
On peut dire que de telles idées annonçaient certaines règles du droit
international humanitaire. Au cours de l'histoire de la Chine, ces enseignements
- établir une distinction entre combatttants et civils, éviter les maux superflus
- ont été répétés et mis en oeuvre par de nombreux souverains et généraux qui se
sont affrontés à l'époque des « Royaumes combattants » (Chan-kuo, 453-221 av. J.-C.). Plusieurs
nouveaux préceptes sont venus s'y ajouter, tels que ne pas poursuivre un ennemi
défait, ne pas employer la ruse au cours des combats, ne pas tuer les hommes qui
se sont rendus. Certains de ces principes ont pris, par la suite, une extrême
importance dans la pensée occidentale, bien qu'il n'existe pas forcément de
relation de cause à effet entre leur influence en Chine et leur cristallisation
en Occident. Ce n'est, par exemple, qu'en 1868 que la Déclaration de
Saint-Pétersbourg a reconnu formellement que le seul objectif légitime de la
guerre est d'affaiblir les forces militaires de l'ennemi et que cet objectif
serait dépassé par l'emploi d'armes qui aggravent inutilement les souffrances
des hommes hors de combat, ou rendent leur mort inévitable.
L'auteur esquisse enfin la relation entre la Chine moderne et le
droit international humanitaire. L'histoire de la contribution de la Chine au
développement du droit international humanitaire actuel est exemplaire, puisque
la Chine a ratifié la plupart des instruments fondamentaux don t cette branche
du droit s'est dotée depuis 1904. En 1983, la Chine est devenue le premier
membre permanent du Conseil de sécurité à ratifier les deux Protocoles (I et II)
de 1977 additionnels aux Conventions de Genève et elle est, aujourd'hui encore,
l'un des deux seuls membres permanents qui ont ratifié les deux Protocoles. En
résumé, M. Zhu donne une très bonne description de la manière dont les principes
humanitaires ont pris racine en Chine.
Dans le
chapitre II, l'auteur résume les règles et les principes essentiels du droit
international humanitaire, en présentant à nouveau de manière concise le contenu
de base du droit international humanitaire. Ce faisant, il s'attache en priorité
aux aspects essentiels des quatre Conventions de Genève, des deux Protocoles
additionnels et des sept Principes fondamentaux tels qu'ils ont été formulés en
1978 par un groupe d'experts réuni par le CICR. Ce résumé du droit constitue un
excellent point de départ pour des études ultérieures.
Dans le chapitre III, M. Zhu aborde plusieurs problèmes majeurs qui
se posent actuellement dans le domaine du droit international humanitaire. Il
s'agit notamment de la distinction entre conflits armés internationaux et
conflits armés internes, de la relation entre la clause de Martens et les armes
nucléaires, du rapport entre les principes humanitaires et la nécessité
militaire, du droit dont jouit le CICR de visiter les prisonniers et les
détenus, ainsi que des sanctions en cas de violations du droit international
humanitaire. Le premier problème examiné est celui de la distinction entre
conflits armés internationaux et conflits armés internes. L'auteur relève que si
toutes les règles et tous les principes ont été inspirés par des considérations
d'humanité et par le désir de limiter le plus possible les préjudices causés par
les conflits armés, le champ d'application des règles du droit humanitaire
dépend beaucoup de la nature des conflits armés. Afin d'illustrer son propos, M.
Zhu analyse la décision de la chambre d'appel du Tribunal pénal international
pour l'ex-Yougoslavie relative à l'exception préjudicielle sur la compétence
dans l'affaire Tadic [5].
Dans cette décision, la distinction entre conflits armés internationaux et
conflits armés internes joue un rôle important, mais son impact est diminué par
la manière dont la chambre d'appel interprète l'article 3 du Statut du Tribunal,
estimant que cet article englobe les violations graves du droit international
humanitaire qui ne sont pas couvertes pas d'autres articles du Statut. Peut-être
pourrait-on ajouter qu'en elle-même, la distinction entre conflits armés
internationaux et conflits armés internes n'affecte pas réellement de manière
négative la philosophie qui sous-tend le droit humanitaire - à savoir, la prise
en compte des souffrances dans un esprit d'humanité -, étant donné que les
violations des règles humanitaires peuvent encore être sanctionnées sous
différentes appellations, en vertu du régime juridique national. Ainsi
considérée, la distinction entre conflits armés internationaux et conflits armés
internes permet de tracer la ligne de démarcation entre le régime juridique
international et le régime juridique national. Le fait de qualifier un conflit
armé de conflit interne ne confère pas nécessairement l'impunité à ceux qui
commettent des actes inhumains. Le point faible de ce processus, c'est qu'en
vertu du régime juridique national, les mesures de coercition risquent de
manquer d'efficacité, bien qu'en lui-même, le dispositif coercitif international
ne soit pas beaucoup plus solide. LeTribunal pénal international pour
l'ex-Yougoslavie est le premier tribunal de ce type créé depuis la Seconde
Guerre mondiale.
La deuxième question d'actualité
sur laquelle se penche l'auteur est celle de la relation entre la clause de
Martens et les armes nucléaires. Son point de vue est le suivant : étant donné
que les armements nucléaires sont capables de provoquer des destructions
massives, des blessures massives ou des empoisonnements massifs, on peut se
demander si ces armes peuvent être utilisées dans le respect des principes
essentiels du droit international humanitaire, ceux-ci interdisant aux parties
engagées dans un conflit armé d'employer tout moyen ou toute méthode de combat
de nature à provoquer des maux superflus ou frappant indistinctement les civils
et les combattants. Selon M. Zhu, il serait peut-être possible d'appliquer ici
la clause de Martens, en tant que principe du droit international coutumier qui
prévoit l'application de coutumes internationales et les exigences de la
conscience publique en l'absence de règle positive [6]. Il estime toutefois,
pour sa part, que la clause de Martens doit être interprétée et appliquée de
manière concrète à la lumière des circonstances particulières (et sans cesse
différentes). Cela débouche sur une situation extrêmement complexe, comme le
démontre l'avis consultatif de la Cour internationale de Justice.
[7]
La question qui est ensuite examinée par M.
Zhu est celle du rapport entre le droit humanitaire et la nécessité militaire.
Il relève que les règles essentielles du droit international humanitaire ont été
adoptées par les États
souverains qui souhaitent accepter le libellé de ses dispositions dans la mesure
où leurs exigences militaires le permettent. Par conséquent, il existe une
doctrine de la nécessité militaire, selon laquelle l'existence de cette dernière
pourrait constituer une exception aux règles générales du droit humanitaire. M.
Zhu avance que cette doctrine ne devrait pas être interprétée de manière trop
large, car cela équivaudrait à dire que chaque fois que la nécessité militaire
existe, les lois de la guerre cessent d'être applicables. Selon l'auteur, les
lois de la guerre sont spécifiquement conçues pour s'appliquer à toutes les
phases de la guerre et la nécessité militaire ne peut justifier la violation
d'une règle de droit positif. Il estime que la nécessité militaire, même si elle
revêt un caractère de la plus extrême urgence, ne peut constituer une exception
aux règles du droit international humanitaire, sauf si ces règles elles-mêmes le
prévoient.
M. Zhu aborde alors la question du
droit, dont jouit le CICR, de visiter les prisonniers politiques et les détenus
de sécurité. Il reconnaît que les Conventions de Genève et leurs Protocoles ne
fournissent pas de base juridique à de telles visites en l'absence de conflit
armé. Il relève cependant que le CICR dispose d'un large mandat de mener des
activités humanitaires en tout temps et en toutes
circonstances et qu'il a été universellement reconnu
comme ayant le droit de prendre certaines initiatives dans le domaine
humanitaire. L'auteur estime que les visites du CICR aux prisonniers politiques
et aux détenus de sécurité entrent dans le cadre d'un tel mandat et ne devraient
pas être mises en question.
La dernière question
d'actualité est celle des sanctions en cas de violations du droit international
humanitaire. M. Zhu passe en revue l'état actuel des régimes en vigueur
prévoyant de telles sanctions et il analyse différentes questions en rapport
avec les deux Tribunaux pénaux qui ont été récemment établis. Il estime que ces
Tribunaux auront un impact positif sur l'application effective du droit
international humanitaire. Naturellement, ce sont là des aspects extrêmement
sensibles et M. Zhu pose plusieurs questions pertinentes, en s'efforçant de
faire valoir son point de vue de manière succincte. Aussi disputées
soient-elles, ces questions ont été traitées de manière équitable par M. Zhu.
Bien sûr, pas plus que quiconque, l'auteur ne pourra y répondre de manière
définitive. L'intérêt d'une telle discussion réside davantage dans les questions
pertinentes qui sont ainsi soulevées que dans les efforts visant à y apporter
des réponses claires.
Dans le chapitre IV, M. Zhu
analyse plusieurs caractéristiques spéciales du droit international humanitaire
en tant que branche distincte du droit international public. Afin de faciliter
la diffusion du droit international humanitaire en Chine, l'auteur décrit et
analyse diverses règles et divers principes de base, en s'attachant en
particulier aux différents aspects des règles destinées à garantir la plus
grande protection possible aux victimes des conflits armés. Par exemple,
l'article 2 commun aux Conventions de Genève prévoit que les Conventions de
Genève s'appliquent à tous les cas de guerre déclarée ou de tout autre conflit
armé, même si l'une des parties ne reconnaît pas l'état de guerre. Il prévoit
également que si l'un des belligérants n'est pas partie aux Conventions, les
règles contenues dans les Conventions restent applicables entre les autres
parties, ce qui va à l'encontre de ce que l'on nomme en droit international
général la « clause si omnes ». Il y a une autre règle de même nature : les Conventions de Genève
n'autorisent pas les personnes protégées à renoncer aux droits qu'elles leur
confèrent, cela dans le but d'éviter que la puissance occupante n'abuse de la
précarité de leur statut et de leur faiblesse. M. Zhu évoque les fondements
théoriques et historiques de ces règles et souligne qu'elles n'ont qu'un seul
but : offrir une protection effective aux victimes de la
guerre.
Dans le chapitre final, l'auteur établit
une comparaison entre le droit international humanitaire et le droit
international des droits de l'homme. Il s'efforce d'établir clairement la
distinction entre ces deux branches du droit, car une certaine confusion règne
actuellement en Chine à ce sujet. Naturellement, le droit international
humanitaire et le droit international des droits de l'homme ont pour origine le
même souci de protéger l'individu - ils comportent donc de nombreux points
communs. C'est peut-être pourquoi, en Chine, beaucoup de gens pensent que droit
international humanitaire et droit international des droits de l'homme ne font
qu'un. M. Zhu souligne les différences - sources et champ d'application,
notamment - qui séparent ces deux branches du droit.
Il relève le caractère « politiquement sensible » du
droit des droits de l'homme, contrairement aux règles du droit international
humanitaire qui sont plus claires, plus concrètes et plus universellement
reconnues. Par ailleurs, le mécanisme de surveillance prévu en matière de droits
de l'homme est d'une très grande complexité et il fait notamment appel à des
organisations intergouvernementales, telles que les Nations Unies, et à de
nombreuses organisations non gouvernementales. Ce mécanisme, aujourd'hui, n'est
pas parfait et provoque souvent des frictions. L'auteur relève que si de
nombreuses organisations non gouvernementales semblent surtout s'attacher à
détecter les défauts des systèmes nationaux, le CICR s'efforce, de son côté, de
rester fidèle à ses principes de neutralité et d'indépendance, une qualité rare
dans un monde où abondent la partialité et la propension à observer deux poids
deux mesures.
Nous dirons, pour conclure, que
l'ouvrage de M. Zhu est admirable. Les réflexions approfondies d'un érudit
chinois sur les règles et les principes essentiels du droit international
humanitaire y sont présentées. Le juge Shi Jiuyong, de la Cour internationale de
Justice, écrit dans la préface que cet ouvrage représente une contribution
importante, de portée pratique, au développement du droit international
humanitaire et qu'il entraînera dans son sillage de nouveaux travaux de
recherche et de nouvelles publications sur le droit international humanitaire en
Chine. Je voudrais simplement ajouter ici que je souhaite le voir paraître en
anglais.
Notes:
1 Arrêt
relatif à l'appel de la défense concernant l'exception préjudicielle
d'incompétence, le Procureur c/ Dusko Tadic, alias « Dule », affaire
no IT-94-1-AR72 (Tribunal pénal
international pour l'ex-Yougoslavie, Chambre d'appel, 2 octobre 1995), par.
102.
2 Rédigée par Li
Chang-Ming et Yuan Tian-Yi, respectivement secrétaire général et directeur du
Policy Research Bureau, Croix-Rouge
chinoise.
3 Rédigée par Christophe Swinarski et
Alfred Michael Boll, respectivement chef de délégation et délégué, délégation
régionale du CICR pour l'Asie de l'Est.
4
L'auteur étaie son argumentation en s'appuyant sur Jean Pictet, Développement et principes du droit international
humanitaire, Institut Henry-Dunant et Pedone,
Genève/Paris, 1983, p. 12 ; Mohammed Bedjaoui, La
guerre aujourd'hui - Défi humanitaire. Rapport à la Commission indépendante sur
les questions humanitaires internationales,
Secrétariat de la Commission indépendante sur les questions humanitaires
internationales, Genève, 1986, p. 22.
6 M. Zhu
fait référence à l'avis consultatif rendu par la Cour internationale de Justice
sur la licéité de la menace ou de l'emploi d'armes nucléaires, 1996, par.
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